L'entraînement jusqu'à l'échec freine peut-être vos progrès, une diminution de l'intensité peut être la clé d'une meilleure prise de masse et de force.
Vous savez qu'un travail intense est nécessaire pour prendre de la masse et de la force. Après tout, ce n'est pas pour rien que les gars les plus musclés à la salle soulèvent des haltères qui pèsent plus lourds que la moitié des abonnés. Cependant, ce n'est pas parce que votre voiture peut aller à 180 km/h que vous devez conduire aussi vite, bien au contraire. Pour prendre du muscle et de la force tout en évitant les blessures et le surmenage, il faut apprendre à garder des réserves pendant la séance et éviter de pousser l'entraînement jusqu'à l'échec.
LE PREMIER PROBLÈME que pose le concept d'entraînement à l'échec est l'élaboration d'une définition consensuelle. Pour un culturiste de weekend, l'échec survient quand la brûlure commence à se faire sentir, tandis qu'un vétéran du powerlifting sait qu'il arrive au bout de ses efforts, quand il commence à saigner du nez pendant une série de squat démente.
Je propose une définition satisfaisante : aller jusqu'à l'échec revient à "continuer à aligner les répétitions (en réalisant les portions concentrique, montée de la charge) et excentrique (descente de la charge) jusqu'à ne plus pouvoir utiliser une bonne technique ou se passer de l'aide d'un partenaire, ou les deux."
Autrement dit, l'entraînement jusqu'à l'échec consiste à poursuivre une série jusqu'à ne plus pouvoir faire une répétition de plus avec une technique correcte. (Il existe d'autres types d'échecs plus spécifiques; ils sont décrits dans le schéma "L'échec des définitions".)
"C'est l'augmentation graduelle de l'intensité qui stimule la prise de masse"
LE SUCCÉS DE L'ÉCHEC
On peut présumer que l'entraînement à l'échec est utilisé par les pratiquants de la musculation depuis les débuts de ce sport, mais il est devenu populaire grâce à Arthur Jones (inventeur des machines Nautilus) et Ellington Darden, créateur du système d'entraînement à haute intensité (HIIT), les gourous du bodybuilding des années 70.
Grâce en partie à de célèbres adeptes, comme les compétiteurs d'Olympia Mike Mentzer et Casey Viator, la méthode HIIT s'est répandue, promettant des gains de masse phénoménaux avec des séances de 30 minutes maximum. Ils étaient convaincus que la dernière répétition de toute série effective était la plus productive de toutes.
Cette répétition ultime et douloureuse est censée stimuler l'adaptation musculaire : il faut donc à tout prix la réaliser.
Soyons clairs, pour les adeptes du HIIT, il s'agit de la dernière répétition possible, pas de la dernière qu'on a envie de faire. De nombreux pratiquants font deux, trois ou même cinq ou six répétitions éprouvantes après que leur bon sens leur ait intimé d'arrêter, e ils demandent l'aide d'un partenaire d'entraînement pour réaliser ces toutes dernières répétitions.
Cependant, le volume des séances HIIT reste faible. En général, on ne fait qu'une série effective (jusqu'à l'échec) par exercice à raison d'un ou deux exercices par groupe musculaire et de trois séances par semaine. Une charge de travail aussi légère et l'accent porté sur la récupération expliquent l'efficacité de l'entraînement HIIT. Cependant, je pense que ce n'est pas le meilleur choix pour la majorité des pratiquants. Une étude réalisée en 2007 par l'Université Australienne de Charles Sturt a trouvé que les joueurs de basket-ball et de volley-ball qui utilisaient les répétitions forcées pendant leur entraînement ne prenaient pas plus de force que ceux qui allaient au-delà de l'échec.
Actuellement, la majorité des piliers de salle travaillent de plus en plus fréquemment jusqu'à l'échec, sans cependant pousser l'entraînement aussi loin, en appliquant parfois cette technique à chaque série de chacune de leurs qu'âtres ou cinq séances par semaine. Pour la plupart d'entre nous, un tel niveau d'intensité est trop élevé pour une bonne récupération.
"Le travail à intensité élevé peut être efficace ... Mais, je persiste à dire qu'il vaut mieux l'éviter"
CONSEILS INTEMPORELS
La majorité des spécialistes de la science de l'exercice conviennent que l'entraînement jusqu'à l'échec, surtout quand l'aide d'un partenaire est nécessaire pour continuer, est au mieux inutile, et au pire dangereux. Ils affirment que c'est l'augmentation graduelle de l'intensité qui stimule la prise de masse (autrement dit, augmentation progressive de la charge, allongement des séries avec la même charge, ou autre méthode traditionnellement utilisée pour accentuer la difficulté d'une séance de musculation). Comme ces résultats peuvent être obtenus sans aller jusqu'à l'échec, la dernière et mythique répétition absolue n'est pas nécessaire.
En fait, cette méthode peut-être contre-productive. Les séries amenées jusqu'à l'échec total font surgir le spectre de la blessure : la diminution de la qualité de la technique s'accompagne d'une augmentation du potentiel de surentraînement du système nerveux central. Cela peut amener à une maladie, à une perte de force et même de motivation.
L'entraînement à l'échec n'a rien de nouveau, et l'idée qu'il est peut être sage de l'éviter est encore plus ancienne.
Les hommes forts d'antan avaient compris ce que les partisans du travail jusqu'à l'échec et les fanatiques du râtelier ont oublié : la force est un acquis, et il faut la travailler en conséquence. Il est impossible d'améliorer ses acquis quand on est fatigué ou qu'on utilise une technique déficiente. Un bon instructeur de tennis ou de golf vous dira d'arrêter, si vous commencez à ressentir la fatigue ou quand vous avez du mal à conservez une bonne technique.
À ce stade, il sait qu'il vaut mieux vous renvoyer au vestiaire. Au bout du compte, tout dépend du composant oublié de l'entraînement de force : le système nerveux.
Le système nerveux central contrôlant tous les muscles et la capacité de les recruter et de produire une force maximum, il faut lui donner le temps de récupérer pleinement si l'on veut optimiser ses performances.
UTILISER SON CERVEAU
Il est évident que les muscles ne peuvent pas grossir indéfiniment, mais, à condition de suivre un bon entraînement, il est possible d'améliorer graduellement le système nerveux. C'est comme cela que les athlètes appartenant à une catégorie de poids particulièrement augmentent leur force sans prendre de poids.
Observez certains des athlètes les plus musclés et les plus forts et vous verrez qu'ils s'entraînent rarement jusqu'à l'échec, ce qui leur permet de s'entraîner tous les jours.
Même si vous ne pratiquez ni l'entraînement à intensité élevée, ni les reps forcées, et que vous n'allez pas jusqu'au point où vous n'arrivez plus à soulever la charge, vous allez sans doute trop près de l'échec.
L'un des grands défauts de l'entraînement jusqu'à l'échec est que les dernières répétitions sont généralement lentes et ardues, et donc ne ciblent pas les fibres musculaires au potentiel de croissance le plus élevé.
Les unités motrices les plus volumineuses et les plus fortes (les nerfs et les cellules musculaires qu'ils contrôlent) n'entrent en jeu que pendant les exercices requérant beaucoup de force. Cependant, quand l'accélération ralentit, comme c'est le cas à la fin d'une série poussée jusqu'à l'échec, la force diminue.
Les unités motrices sont désactivées, en commençant par les plus volumineuses et les plus fortes. Pour conserver le niveau le plus élevé de recrutement des unités motrices, le taux d'accélération de la charge doit aussi être élevé, notamment pour les séries de huit à 12 répétitions normalement utilisées par les Bodybuilders.
Il faut toujours utiliser une accélération maximum pour soulever la charge, afin de recruter les unités motrices à seuil élevé, et arrêter la série quand la vitesse diminue de manière notable.
Quand on continue les séries jusqu'au point où l'on arrive plus, qu'à aligner des répétitions lentes et ardues, on surcharge les unités motrices moins volumineuses et moins fortes, qui n'ont aucun impact sur la prise de masse ou de force ou sur l'amélioration de la rapidité. En continuant à travailler à vitesse relativement élevée, on évite également la fatigue nerveuse associée à des répétitions difficiles.
PLAN INFAILLIBLE
Il ne fait aucun doute que de nombreux pratiquants doivent intensifier leur entraînement pour obtenir des résultats. Il peut être très efficace de se donner à fond à la séance (en fait, comment savoir qu'on est arrivé à l'échec sans cela ?). Néanmoins, le risque de blessure et d'épuisement total su système nerveux central fait qu'il est difficile d'approuver complètement les travail jusqu'à l'échec. Pour un bon préparateur physique, il lui suffira d'observer un pratiquant à l'entraînement pendant 30 minutes, pour prédire les progrès qu'il réalisera dans les 12 à 16 semaines suivantes, selon qu'il travaille proche de l'échec ou non.
"Le risque de blessure et d'épuisement du système nerveux central incite à déconseiller le travail jusqu'à l'échec."
En générale, je recommande d'arrêter les séries une ou deux répétitions avant de ne plus pouvoir utiliser une technique stricte. Tant qu'on soulève des charges représentant 70% à 90% du poids maximum pouvant être réalisé sur une répétition, la série est assez intense pour la prise de masse et de force.
Laissez l'explosivité vous guider. Ne vous fixez pas un nombre de répétitions à atteindre pour chaque série. Au lieu de cela, laissez l'accélération déterminer le moment où vous devez vous arrêter.
Par exemple, pour un exercice où vous faites normalement trois séries de 10 répétitions, choisissez une charge vous permettant d'aligner 10 répétitions avec une bonne technique. Au lieu de faire des séries, réalisez autant de reps à vitesse maximum que vous le pouvez. Le nombre de reps importe peu. Dès que vous vous sentez ralentir, faites une pause et recommencez jusqu'à ce que vous arriviez à un total cumulé de 30 reps.
Jerry YEUNG
Préparateur physique "The Gym Tahiti"
BEES-1 Métiers de la Forme depuis 1998
IFBB Certified Advanced Bodybuilding & Fitness Trainer
Certified Trainer Institut de Culture Physique Weider
Pour un séminaire sur la préparation physique et nutrition sportive, veuillez prendre contact auprès de la rédaction ifbbtahiti.mag@gmail.com
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